Guerre 1914-1918 - Histoire du XXe siècle

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La petite fille qui voulait voir la guerre

Christelle Galland / Jean-Yves Le Naour, Bamboo (Grand Angle), 2018, 48 p.
Un soldat qui meurt au front, c’est une famille dévastée à l’arrière. Clémence a 10 ans et vit à Charnay-Lès-Mâcon. Elle doit présenter un exposé à sa classe, mais n’a aucune idée de ce dont elle peut parler. En passant devant le monument aux morts, elle remarque son nom de famille. Elle a donc un ancêtre qui est mort pour la France pendant la Première Guerre mondiale. Le voilà son sujet d’exposé ! En cherchant dans le grenier de ses grands-parents, mais aussi dans les archives départementales, Clémence va faire connaissance avec son aïeul et découvrir une autre histoire de la Grande Guerre, celle que l’on ne voit jamais : celle de l’arrière, loin des tranchées.

Les français dans la Grande Guerre

Condon Cédric / Jean-Yves Le Naour, produit par Emmanuel Migeot (Kilaohm productions) et l’ECPAD pour la chaîne Histoire, 2008, 52 mn.
1918. Voilà déjà plus de trois ans que la France est en guerre. Pourtant en août 1914, tous les soldats étaient partis pour quelques semaines, quelques mois tout au plus ; ils devaient s’en revenir pour les vendanges selon les optimistes, pour la Noël selon les pessimistes. Mais à l’heure de la nouvelle année 1918, les illusions de la mobilisation sont bien loin : cela fait 41 mois que les poilus piétinent dans la boue des tranchées, qu’ils subissent les bombardements, la peur, le froid, la pluie, les poux, les rats, et l’odeur des cadavres en décomposition dont ils tentent de se protéger en fumant la pipe ou en grillant des cigarettes. « Ça a commencé comme une fête », se souvient le poilu Gabriel Chevallier, mais en 1918, il n’y a plus qu’un immense calvaire dont on ne voit pas la fin.
Avec le temps, un fossé semble s’être creusé entre le front et l’arrière : les soldats qui risquent quotidiennement leur vie considèrent les civils comme des embusqués qui ne sont pas avares du sang des autres et qui profitent de la situation pour s’enrichir ou « faire la vie ». « Ils se la coulent douce à l’arrière, enrage le personnage des Croix de bois de Dorgelès. Ils ne savent pas ce que c’est que la guerre. Personne n’y pense… Pour eux c’est comme si la guerre était à Madagascar où chez les Chinois ». Et la chanson de Craonne confirme :

C’est malheureux de voir
sur les grands boulevards
tous ces gros qui font la foire
Si pour eux la vie est drôle
Pour nous c’est pas la même chose .

L’arrière « se la coule-t-il aussi douce » que les poilus veulent bien le penser ? Le pays oublie-t-il ses enfants aux tranchées ? Y a-t-il deux France, l’une au combat, l’autre qui se désintéresserait de la guerre ? La frustration des poilus qui trouvent insupportable que d’autres continuent à vivre, presque normalement, quand eux souffrent le martyre ne doit pas égarer : si la France continue de tenir en 1918 face à l’Allemagne, c’est parce que tout le pays est uni dans la lutte, parce que chacun est à son poste, à l’avant comme à l’arrière – le soldat aux tranchées, l’ouvrière dans l’usine de guerre. Cette mobilisation humaine, économique et psychologique porte un nom : la guerre totale. Le mot n’est pas encore inventé, on lui préfère l’expression de « guerre intégrale » qu’utilise Clemenceau en 1917, mais le sens est le même : toutes les forces du pays sont au service de la guerre.
Tournées par la section cinématographique de l’armée créée en 1915, ces images exceptionnelles ne nous montrent cependant qu’un versant de la guerre. Au service de l’effort national, elles disent la bonne humeur des soldats à l’avant et la détermination de l’arrière. Elles ne racontent pas le doute, la tristesse, et surtout pas la mort. A nous de nous rappeler que ce qu’elles ne montrent pas est au moins aussi important que ce qu’elles ont l’ambition de prouver.

Nostradamus s’en va-t-en guerre : 1914-1918

Hachette littératures, 2008, 188 p.
Imagine-t-on qu’à la veille de fuir la capitale, le 2 septembre 1914, le gouvernement français convoque Mme Fraya, une voyante mondaine, pour lui demander si l’ennemi s’emparera de Paris ? Sait-on que le président Raymond Poincaré a reçu cette même Mme Fraya à l’Élysée en 1917 pour lui poser des questions sur la fin de la guerre ? Ou encore qu’il a reçu une jeune bergère vendéenne qui, se croyant une nouvelle Jeanne d’Arc, prétendait avoir reçu de Dieu la mission de bouter l’ennemi hors de France ? De 1914 à 1918, une flambée de prophétisme et de voyance saisit en effet les Français qui tentent de se rassurer comme ils peuvent en déchiffrant les quatrains de Nostradamus et les lignes de la main, en interrogeant les esprits, les boules de cristal ou le marc de café, tandis que les poilus, dans les tranchées, communient dans des rituels magiques censés les protéger de la mort. En ces temps d'angoisse, les contemporains s'en remettent tout simplement à l'occulte pour mieux supporter le présent et espérer enfin en l'avenir. Jean-Yves Le Naour rend compte ici d’une culture populaire, longtemps ignorée par les historiens, et offre une nouvelle approche pour la compréhension du premier conflit mondial.

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